À l’heure, où la pandémie du COVID 19 met en lumière, si besoin était, les inégalités entre grandes surfaces et petits commerces, le consommateur reste roi.
Le re-confinement, ou le confinement saison 2, met en avant la notion d’essentiel dans la consommation. C’est un sujet qui m’interpelle, car ce qui est essentiel pour moi, ne l’est pas forcément pour vous, et réciproquement l’inverse.
Par exemple, un peigne ou une brosse sont essentiels pour se coiffer, mais est-ce essentiel pour un chauve, ou une personne qui s’est fait raser le crâne ? Cet exemple, et il y en a d’autres, montre comment la définition de produits essentiels ne fait pas vraiment sens pour définir de l’ouverture ou non de magasins ou de rayons.
Faire réfléchir le consommateur fait sens, et c’est certainement plus complexe que de poser des interdits. Comment comprendre et interpréter les rayons vides de PQ ? La COVID 19 est-elle un puissant laxatif ?
Le livre est, et restera comme pour beaucoup d’entre nous, essentiel à ma vie. Il ne se passe pas un jour sans que je prenne le temps de livre. Depuis toujours, je vais acheter mes livres en librairie, j’en reçois aussi en service de presse, et ce n’est pas parce que les libraires sont fermés, que je vais les acheter en grande surface. Je suis consommateur, je choisis où j’achète quoi.
D’ailleurs, combien de personnes s’offusquent aujourd’hui de la fermeture des libraires, alors qu’elles n’avaient pas mis les pieds dans une librairie depuis des années ? Si les librairies ont du mal à vivre, c’est parce que le consommateur fait le choix de la facilité en achetant ses livres, là où il fait ses courses, et non chez un spécialiste du livre.
En fait, les librairies sont physiquement fermées, mais aujourd’hui la plupart d’entre elles possèdent une e-boutique. Le consommateur a le choix de commander en ligne chez son libraire, ou chez un éditeur, au lieu de commander sur le site d’une grande enseigne, ou d’un spécialiste du commerce en ligne.
Pour ma part, c’est ce que je fais, même en vivant en campagne. En ville, la livraison se fera peut-être dans la journée avec une grande enseigne, en campagne le délai est deux à trois jours. Ce délai doit-il pousser le consommateur à avoir comme critère de choix la rapidité de livraison ? Derrière cette question, il s’agit de savoir dans quel territoire nous voulons vivre. Choisir la facilité d’une zone commerciale parce qu'il y a un parking, c’est participer à la désertification des centres-villes, que ce soit dans les grandes agglomérations où dans les villages.
Il serait temps que le consommateur ne croie plus au gratuit, et à la magie des promotions continuelles. Le consommateur doit acheter ce qui est essentiel pour lui, là où il donne vie à son territoire. Il doit apprendre à ne pas céder aux sollicitations, souvent très subtiles des marques, ou des grandes enseignes. De ce point de vue, le click and collect, ou le drive sont plus protecteurs, même si les sites sont conçus pour vous faire acheter plus.
Pour autant, je sais que lorsque j’entre dans une librairie pour acheter un livre précis, je sortirais avec d’autres livres. Soit parce que j’aurais été attiré par une couverture, un auteur, un résumé ou par un conseil du libraire. Aurais-je pu me passer de ses livres ? La réponse est peut-être, mais en les achetant, je participe à la vie du territoire où j’ai envie de vivre.
Enfin, il est affolant de constater, et ce sera mon dernier propos, que le consommateur peut créer lui-même de la pénurie. L’exemple de la pénurie de PQ en dit long sur l’individualisme, et la bêtise collective. En achetant selon son besoin, la pénurie n’existerait pas, n’est-ce pas une démonstration que le consommateur a le pouvoir ?